c4Pendant longtemps, on a cru comme Rabelais que le rire était le propre de l’homme. Un article  du monde d’Hervé Morin, intitulé « le chimpanzé, rieur social ? », paru le 05 mars 2011 fait le point  sur les recherches concernant le rire des primates  Le propre de  l’homme consiste à  rire dans des c1circonstances très diversifiées. Pour les chercheurs, « le sens de l’humour est propre à l’homme[…]les singes, grands et petits, semblent imperméables au comique de situation »Le primate se contente de rire dans des situations très stéréotypées : jeux, chatouillis, courses-poursuites Des scientifiques de l’Université de Portsmouth ont étudié les enregistrements vidéo de 500 scènes de jeu prises dans un orphelinat en Zambie. Ils ont distingué le rire d’imitation provoqué par le rire d’un congénère du rire spontané. Apparemment, ce rire d’imitation aurait pour but de  renforcer les liens sociaux.Plus bas dans l’échelle de l’évolution, le professeur américain Jaak Panksepp a montré que le rat riait quand on le chatouillait. Son rire n’est pas audible par l’oreille humaine , mais, il a pu être mesuré grâce à des instruments de laboratoire. A quand des études sur c2le rire de la baleine (rire comme une baleine = rire très fort), ou du cheval ?

 En tout cas, de tout temps, l’homme a ri. Dans son  livre « histoire du rire et de la dérision », publié chez Fayard, Georges Minois affirme que « l’humour n’a ni âge, ni patrie ». Certes, « il prend des formes différentes », à travers les âges et les lieux, mais il n’en demeure pas moins permanent. Nous pouvons penser, comme Raymond Devos dans son fameux sketch « l’homme primitif », que l’homme préhistorique était sujet aux rires et aux sourires. Dès les premiers écrits, nous retrouvons la présence de ce phénomène. Même, les dieux rient

George Minois évoque un papyrus alchimique du 3ème siècle après JC, le papyrus de Leyde qui raconte que « l’univers est né d’un énorme éclat de rire », uns sorte de Big Bang. cosmique et comique « Dieu ayant ri, naquirent les sept dieux qui gouvernent le monde … Lorsqu’il eut éclaté de rire, la lumière parut[…] Il éclata de rire pour la seconde fois : tout était eaux. Au troisième éclat de rire, apparut Hermès. Ce Dieu éclate de rire car, peut être il a pris conscience de l’absurdité de son existence, comme Démocrite, philosophe présocratique, qui chaque matin se rendait sur le port pour se tordre de rire. Son éclat de rire tirait son origine dans le spectacle absurde des gens qui faisaient des allées et venues autour des bateaux pour décharger des marchandises complètement inutiles.. Son rire exprimait une sorte de mépris par rapport aux activités humaines, souvent il est vrai, superficielles. Dans son livre « mythe et création », publié auxc3 Presses Universitaires de Lille, Pierre Cazier nous apprend que, dans un mythe de l’ancienne Egypte le monde est créé à la suite de 7 éclats de rire du Dieu Thot. Il cite Marius Schneider qui écrit dans « le rôle de la musique dans la mythologie et les rites des civilisations non européennes », publié chez Gallimard : « Thot rit encore 6 fois et chaque éclat de rire donna naissance à des êtres et à des phénomènes nouveaux. La Terre, prenant le son, poussa à un cri  à son tour, se courba et les eaux se divisèrent en 3 masses. Le destin naquit, la justice, l’âme. Cette dernière, en voyant le jour, rit puis pleura, sur quoi le Dieu siffla, s’inclinant vers la terre et produisit le serpent python qui est la prescience universelle ».

 Nous verrons dans un autre article que ce qui change à travers le temps et l’espace c’est la question du pourquoi et son statut. Georges Minois distingue 3 grandes périodes : « l’Antiquité qui sacralise le rire et en fait un ciment de la cohésion sociale ; le Christianisme le désacralise en le plaçant du côté du Diable ; l’époque moderne, qui associe le rire à une existence vide de sens, où le sacré est absent ».Le rire divin, le rire diabolique et le rire humain

Pascal Broutin