Retrouver son père n’est pas une chose facile, surtout si on a cru qu’il était mort et que ses retrouvailles entraînent la mort du géniteur. Tel est le thème de 2 romans que je voius conseille de lire dans le cadre du thème du BTS « génération(s) »: « Magnus » de Sylvie Germain et « venge-moi » de Patrick Cauvin, Claude Klotz de son vrai nom.
magnusLe livre de Sylvie Germain « Magnus » est d’abord intéressant, par la forme. Elle décrit sa manière d’écrire dans les pages 13 et 14. Il s’agit d’un bel exemple de détour dans l’écriture, l’autre thème de cette année. « Une esquisse de portrait, un récit en désordre, ponctué de blancs, de trous, scandé d’échos, et à la fin s’effrangeant. Tant pis pour le désordre, la chronologie d’une vie humaine n’est jamais aussi linéaire qu’on le croit. Quant aux blancs, aux creux, aux échos et aux franges, cela fait partie intégrante de toute écriture, car de toute mémoire. Les mots d’un livre ne forment pas davantage un bloc que les jours d’une vie nhumaine, aussi abondants soient ces mots et ces jours ». Je vous invite à lire intégralement ces 2 premières pages pour vous rendre compte de la qualité du style. Sylvie Germain nous raconte, donc, par fragments, une histoire pleine de secrets. Le héros qu’on a du mal à nommer car il changera plusieurs fois d’identité comme de peau, Franz Georg dans un premier temps est fils d’un médecin allemand et d’une femme proches des hauts milieux Nationaux socialistes. Il vit dans le secret. Un choc, dû selon sa mère à une grave maladie, le prive de tout souvenir antérieur à ses 5 ans. Son oncle Lothar, antinazi réfugié en Angleterre et certains cauchemars, certains délires, provoqués par de fortes fièvres, vont lui révéler une partie de la vérité. Il va partir sur les traces de son père, au Mexique pour savoir qui il est ? quand est-il né ? de quels parents ? En fait, il apprendra que son père médecin zélé dans les camps nazis, mort en cavale au Mexique (autre secret percé) et sa femme ne sont pas ses parents. Il a été adopté. Il est devenu orphelin suite au bombardement d’Hambourg. Il ne lui reste qu’un élément de ses 5 premières années : un ours en peluche en mauvais état qui porte autour de son cou un noeud sur lequel est écrit « Magnus ». Il adoptera ce nom. Sa mère adoptive n’a eu de cesse de blanchir à jamais les 5 premières années de sa vie. A la fin du livre, il retrouvera son faux père. Il ne lui adressera pas la parole, il ne se fera pas reconnaître, il lui laissera juste un petit mot, suffisant pour entraîner sa mort. Ce roman est tout à fait passionnant par son écriture par le traitement d’un sujet hautement classique : la recherche de ses origines : qui sont nos parents ? Notre père est-il notre géniteur ? Les secrets de famille
De son côté, Patrick Cauvin nous entraine dans une sorte de roman policier. Le héros, jeune juif, réfugié chez sa grand-mère, cauvin1pendant la deuxième guerre mondiale, retrouve sa mère qui a survécu aux camps. Celle-ci s’enferme dans une chasse effrénée à son mari disparu. Accumulant documents, photographies qu’elle observe à la loupe pour retrouver le visage de son homme, elle transforme son intérieur en un véritable mémorial à la Shoah, prodigant peu d’amour à son fils. Ce dernier lui reproche de garder tous ses souvenirs et lui demande de ne plus en parler. Curieusement, par désir d’exclusivité, il ne souhaite pas le retour de son père. Les années passent, on voit l’enfant grandir, traverser une enfance très solitaire, pleine de peurs (peur du train comme les déportés, peur de l’abandon) pour devenir enfin professeur des universités en psychologie de l’enfant. Il n’y a pas de hasard dans cauvin2son parcours. Le roman bascule soudainement à la mort de sa mère. Celle-ci lui fait promettre sur son lit de mort de tuer Mme Klamp, celle qui est à l’origine de la dénonciation. « Elle a brisé nos vies, la tienne aussi », « venge-moi Simon, tu me l’as promis ». Simon va tenir sa promesse et partir à la recherche de la dénonciatrice, dans les Ardennes, dont la description vaut vraiment la lecture. Au chapitre 6, il touve Mme Klamp mais aussi son père par la même occasion.  » Nous ne nous sommes pas touchés », « nous sommes restés longtemps, sans parler », « mon père s’appelle Maxime, je l’avais presque oublié ». « je n’avais pas eu de joie à le perdre, je n’avais pas eu de joie à le retrouver ». Simon va apprendre que son père et Mme Klamp entretenaient une liaison 6 mois avant la rafle, que l’amante était arrivée trop tard pour sauver sa mère et qu’elle aurait empêché l’arrestation de son père. Le doute s’installe. N’aurait-elle pas dénoncé le couple à la gestapo pour avoir les mains libres avec le mari ? Le père était-il de mèche ? Simon va poursuivre sa quête.
Nous nous retrouvons, dans le cadre de la tragédie classique où l’enfant doit venger un de ses parents.
Si vous voulez lire le livre ne lisait pas ce qui suit
Simon avait demandé à une association de retrouver la lettre de dénonciation. Son correspondant lui apprend par téléphone que la lettre est bien signée Mme Klamp. Simon n’a pas le courage de passer à l’acte, malgré l’achat d’un revolver. Il téléphone à son père pour lui annoncer la nouvelle. Cela suffit. Il apprendra par la presse que son père après avoir tué Mme Klamp s’est suicidé. Quelque temps plus tard, Simon recevra, par la poste, une copie de l’original de la lettre de dénonciation. Elle est bien signée Mme Klamp, mais en réalité elle a été écrite par sa mère.
Pascal Broutin