Nous allons parler de rêves et d’imaginaire cette année avec le BTS de français. J’aimerais commencer sous la forme d’un coup de cœur avec l’exa1cellent film de Jeff Nichols paru en DVD « take shelter ». Fabien Gaffez, dans le numéro 611 de Positif intitule son article : « tempêtes sous un crâne ». En effet, ce film raconte les tourments d’un homme, l’excellent Michaël Shannon, aux prises avec tout d’abord des cauchemars qu’il vit de manière intense avec tout son corps, au point d’en ressentir des douleurs au réveil oua3 d’uriner. Puis, il connaîtra des hallucinations en plein jour. Seul, il entendra le tonnerre dans un ciel bleu ou verra des nuages d’oiseaux affolés. Tous ces signes avant-coureurs d’une catastrophe apocalyptique, vont obséder le héros Curtis LaForche et l’amener à agrandir et suréquiper son abri anticyclonique. Michaël Shannon vivra tous ces moments de manière très intense. On sent le désespoir à fleur de peau, l’anxiété puis la paranoïa l’envahir, la schizophrénie de sa mère le menacer à tout instant. Nous voyons sur l’écran la chute irrésistible, la dérive d’un homme. La tornade, les tempêtes sont le reflet de la vie psychique du héros. Les cieux deviennent fous comme Curtis qui perd petit à petit son équilibre : son travail, son chien, ses amis, son couple. Le héros descend sous terre dans son abri anticyclonique pour s’abriter du monde extérieur mais aussi pour essayer d’enterrer ses peurs. Nous suivons l’anxiété d’un homme seul dont le principal tort est de ne pas s’être ouvert à sa femme, de ne pas avoir réussi à communiquer ses peurs J’ai personnellement découvert un acteur remarquable, qualifié par Fabien Gaffez de « reptilien », avec « son physique, à la fois inquiet et inquiétant, sa démarche aussi lente que les pas au milieu d’un cauchema2ar, son phrasé pâteux où les mots tombent comme des éclats de verre, son regard habité par d’obscurs outre mondes ». Ce personnage obscur s’oppose à la luminescence de Jessica Chastain que nous avions déjà rencontrée dans « the tree of life » de Terrence Malick. A côté des acteurs, ce qui est remarquable est la qualité des scènes oniriques. Filmer le rêve est quelque chose de très complexe pour un réalisateur. Il faut éviter les clichés des films d’école de cinéma. Ici, Jeff Nicholls prend le parti de filmer des scènes tout à fait réalistes. Curtis ressent les rêves de manière viscérale. Il se réveille avec la douleur de la morsure du chien dans son bras. Comme le dit fort justement Jeff Nicholls dans un entretien accordé à Michel Ciment (Positif 611), « un personnage si influencé par ses rêves qu’il en arrive à tenir le monde à distance ». Il vit à partir et dans ses rêves. J’aime l’ambiguïté de la fin. Réalité ou réussit-il à faire partager sa paranoïa à sa fille et à sa femme ? Et enfin, la nature, comme chez Malick sa puissance, sa poésie qu’on ne pourra jamais embrasser, ni comprendre. Ce film nous invite à lever les yeux…

Pascal Broutin