a1  Le film de Wim Wenders « every thing will be fine », avec James Franco et Charlotte Gainsbourg » nous interpelle pour plusieurs raisons et en particulier ses thématiques.

Winders s’interroge tout d’abord sur le poids du hasard qui vous amène à changer et à écraser un enfant.

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James Franco et Wim Wenders

Mais, il s’intéresse surtout au processus de création qui se trouve démultiplié suite à un tel drame. Avant son accident, Tomas s’avère être en panne d’écriture. Après, il produira un livre plus fort et plus intense qui le rendra célèbre. Certes, le film interroge la culpabilité de Tomas. Non seulement, il se demande comment sortir de cette culpabilité omniprésente, mais aussi, comment ne pas tirer profit de cet événement dans sa narration ? Wenders revendique cette approche : « je voulais interroger la culpabilité qui est au cœur de toute création d’un écrivain ou d’un cinéaste qui exploite le réel. Est-il légitime d’utiliser à des fins personnelles les expériences ou les souffrances d’autrui pour les transformer en art, en histoire ou en film […] Quelle responsabilité avons-nous quand nous prenons possession de l’expérience d’autres personnes ? Quel est le poids de cette responsabilité ? ». Dans l’entretien qu’il accorde à Adrien Gombeaud dans le numéro 651 de la revue Positif, il revient sur son expérience personnelle, suite à la réalisation du film Nick’s movie. Wenders filme les derniers moments de la vie du réalisateur Nicolas Ray. Il hésite, veut arrêter. Le médecin insiste pour qu’il poursuive. A la mort de Nicolas Ray, il n’arrive pas à monter le film. Son monteur travaille seul. Il voit la, projection du film à Cannes. « Et c’est seulement à ce moment là, en voyant cette copie à la troisième personne que j’ai compris que j’avais laissé tomber mon ami Nick, qu’il avait toujours eu pour projet que nous réalisions ce film ensemble. Maintenant qu’il n’était plus là, je lui devais de terminer ce film à la première personne ». Wenders s’est enfermé à son tour dans la salle de montage pour remonter le film en ajoutant sa voix.

a3De manière annexe, le film aborde aussi le thème du deuil ou comment vivre pour une mère après la mort de son fils qu’elle ne surveillait pas, plongée qu’elle était, dans la lecture de Faulkner. Comment Christopher peut-il grandir après la mort de son frère qu’il n’a pas su protéger et qui est peut être mort à sa place ? J’aime en particulier la fin du film. Christopher ne supporte pas que Tomas soit devenu célèbre grâce à la mort de son frère. La rencontre avec les deux personnages est assez troublante. Elle se tient 12 ans plus tard. Tomas est choqué il ne reconnaît pas Christopher car il l’a déjà transformé en littérature et le surgissement d’une autre réalité le trouble profondément.

Terminons en évoquant le style. Comme toujours, Wenders fait un film total. Il prend grand soin par rapport aux extérieurs dans la nature, à la photographie, à la musique omniprésente d’Alexandre Desplat. A noter tout de même qu’il utilise la 3D à des fins non pas spectaculaires comme dans les grands films d’action, mais pour pénétrer plus en profondeur dans l’intimité des protagonistes. Il est intéressant de voir ce qu’on peut faire discrètement avec la 3D.

Pascal Broutin