litPour fêter l’arrivée du printemps 2 albums jeunesses écrits par 2 grands illustrateurs. Commençons par le prix Baobab de l’album 2009, décerné par le salon de Montreuil : « Annie du lac » de Kitty Crowther, publié à l’École des Loisirs dans la collection Pastel.Ce livre tout en douceur nous raconte un début tout en noirceur. Annie du Lac vit seule près d’un lac, dans une petite maison perchée au sommet d’une colline. Elle porte des habits noirs car elle vient de perdre sa mère mais aussi parce que son cœur pleure. Elle n’accepte pas son physique qui se résume à des grands pieds et un long nez qui tombe à la verticale de ses orteils. Elle ne se regarde plus dans le miroir qu’elle a caché au fond d’un coffre. Elle attend une âme sœur, une présence qui n’arrive pas. « Annie étouffe dans son réveil nocturne. C’est une nuit de trop, pense-t-elle ». Alors, elle décide de se noyer près des trois îles du lac. Mais, ces 3 îles s’avèrent être les chapeaux fleuris de 3 géants phosphorescents qui la sauvent de la noyade. Au réveil, sa vie va changer grâce à ses êtres lumineux qui ont su lui transmettre l’énergie vitale. nécessaire pour renaître Au dessus de sa robe noire, elle va revêtir un pull de lumière. Sa vie va prendre du sens car les géants ont besoin de son aide. Elle doit les guider jusqu’à la mer pour qu’ils puissent s’accoupler à des géantes. Faute de quoi, une malédiction tombera sur eux. Kitty Crowther partage avec Anne Brouillard une ascendance suédoise du côté de sa mère. Nous retrouvons cette nature suédoise ou finlandaise, pleine d’eau, de lac et de mer, cette forêt sombre de conifères, une grande richesse au niveau de la flore terrestre, aquatique mais aussi sur la tapisserie de sa chambre. J’apprécie en particulier 2 éléments dans son travail d’illustratrice : le travail autour de la lumière et la douceur des formes. Kitty Crowther rend particulièrement bien la phosphorescence et la beauté intérieure des personnages à travers une couleur jaune très chaude et lumineuse qui contraste fortement avec le noir du deuil, de la forêt ou de la nuit. Les illustrations privilégient les formes courbes, souples , toutes en douceur. Ce conte merveilleux a exigé 5 ans de travail de la part de son auteur. On sent qu’elle est allée au plus profond d’elle-même pour nous proposer ce conte de sagesse. Si vous voulez en savoir plus sur cette illustratrice, je vous renvoie à un entretien qu’elle a donné pour la revue Citrouille. Vous pourrez également la voir au travail dans une petite vidéo, à l’adresse suivante http://www.ecoledesmax.com/espace_auteurs/videos/video_auteur.php?id=12

L’autre grand illustrateur que nous voudrions associer au printemps est Christian Voltz, à travers son album « la caresse du lit2papillon », publié aux éditions du Rouergue. L’auteur aborde la question douloureuse de l’absence, de la mort d’un être cher. Papapa répond à la question de son petit fils concernant sa femme : « elle est où, Mamama ? ». Christian Voltz arrive à choisir les mots justes pour parler de la présence de l’autre dans nos pensées, mais aussi dans les éléments. Comme à son habitude, l’illustrateur nous propose un album en volume, fait de photographies de ses bricolages. Formidable maître bricoleur de l’illustration, il utilise principalement des matériaux de récupération pour créer ses personnages et ses décors. Il est tout à fait intéressant de retrouver les matériaux utilisés : un cadenas pour faire l’arrosoir, un pinceau pour faire le manche du râteau, du bois et du liège pour représenter les corps, des boutons ou des rondelles pour symboliser les yeux et beaucoup de fil de fer pour construire les visages, les membres. Ses personnages évoluent dans un vrai décor fait de terre, de branches d’arbres. Pour apprécier son travail, je vous invite à visiter son blog personnel à l’adresse suivante : http://www.christianvoltz.com/menu1.html. Vous pourrez y découvrir ses autres albums, son travail de sculpteur, de graphiste à travers quelques unes de ses affiches et de ses expositions et de graveur. Enfin, vous pourrez voir quelques films d’animation qu’il a réalisé pour une télévision allemande.
Pascal Broutin