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La naissance du clown.

Albert Fratellini disait « pour être un vrai clown, il faut avoir vécu ». le clown n’est que le miroir amplifié de bon nombre de nos défauts tournés en dérision ».

Pour les personnes de ma génération qui allaient au cirque, les souvenirs d’enfance nous renvoient à l’image du clown, le clou du spectacle pour nos petits yeux émerveillés. Nous attendions avec impatience l’arrivée du clown blanc souvent sérieux à l’image de nos pères et de nos instituteurs et celle de l’Auguste, bête mais aussi malin, comme nous.

e2Difficile de dater de manière précise, l’arrivée du clown. Il naît dans le cirque. Le premier cirque répertorié en France date de 1774. Un certain Astley débarque à Paris pour créer « son amphithéâtre équestre ». Il serait l’inventeur de la piste ronde. Les spectacles équestres vont se multiplier. Les cavaliers vont se mettre à jongler, faire des acrobaties, mais aussi commencer à faire des farces, appelées « grotesques ». Le mot clown va apparaître au 19ème siècle, signifiant en vieil anglais « paysan, e3rustre mal vêtu ». Très vite, il portera des vêtements trop larges et sera grimé. Il se distinguera des autres clowns par un leitmotiv qu’il scande à loisir comme le célèbre « Boum, boum ! » de Géronimo Médrano ou  le «sans blaaaague ! » et le »pourquoi » de Grock ou « qu’est-ce que c’est que ça que c’est » de Francini. Vers 1900, les costumes deviennent plus flamboyants et se couvrent de paillettes.

Le premier grand duo clown blanc Auguste s’appelle : Footit et Chocolat. Footit est un clown blanc d’origine anglaise. Chocolat, originaire de la Havane, serviteur de Footit, reçoit de nombreux coups pendant le spectacle. Ce spectacle va voir naitre l’expression  :« être chocolat ». Le cirque connaît une crise, mais le clown reste l’une ou l’attraction préféré des enfants

Le clown à l’hôpital :

e4« le rire procure un nettoyage profond à l’intérieur de soi. Il vous ramène très rapidement à l’ici et maintenant. Vous plongez de l’enfer de votre tête vers le paradis de votre ventre. Le rire est un événement total, chaque cellule du corps vibre et se décontracte rapidement » : Docteur Dyan Sutorius.

Le livre « le rire, une merveilleuse thérapie : mieux rire pour mieux vivre » co-écrit par un médecin Tal Schaller et Kinou, un clown professionnel, revient sur l’expérience du clown professionnel dans un contexte particulier: l’hôpital. Dans son introduction, il revient tout d’abord sur l’origine des spectacles, en général

L’expression intense de nos émotions appelée « catharsis » était l’une des médecines les plus anciennes du monde. Il est à la croisée de la médecine et des arts.. L’invention du spectacle naît de la nécessité de remplacer les sacrifices humains par des spectacles non sanglants et de sortir ainsi du e5cercle vicieux de la faute du sang versé.
Pour guérir un malade, on ne s’adressait plus au Dieu responsable de cet état en faisant couler du sang mais en improvisant un spectacle. Pour Aristote qui a mis en avant le concept de catharsis, le spectacle a un effet positif non seulement sur le comédien, le guérisseur en l’occurrence mais aussi sur le spectateur. La danse, la musique, le théâtre, l’expression corporelle ont des vertus thérapeutiques importantes. A Epidaure, dans la Grèce Antique, un centre de cures thermales organisait des représentations théâtrales, des farces, des pantomimes en vue de soigner les malades. Aujourd’hui, nous soignons grâce à la musique ( musicothérapie), grâce à la multiplication des interventions de clown dams les hôpitaux. Nicolas Philibert nous a montré dans le très beau film « la moindre des choses » comment on pouvait traiter les pensionnaires de la clinique psychiatrique de La Borde en les faisant jouer avec des soignants dans une pièce de théâtre. Pour en savoir plus sur cette expérience, je vous renvoie au site de Nicolas Philibert, à l’adresse suivante

Dans d’autres civilisations, nous trouvons également ces phénomènes. Les Dogons du Mali organisent des séances de rire collectif pour extirper le mal d’un malade. Les pitres du tao chinois pratiquent depuis des siècles la méditation du sourire. De nombreuses tribus amérindiennes possédaient leur clown-chamane.

e6L’arrivée des clowns à l’hôpital n’est pas un phénomène nouveau. Au début du 20ème siècle, les clowns célèbres comme Grock ou les frères Fratellini fréquentaient déjà ces institutions. L’écrivain américain Raymond Moody décrit ce travail dans un ouvrage intitulé « guérissez par le rire », publié chez Laffont. Pour lui, il s’agit d’un travail qui ne s’improvise pas et qu’il ne doit pas être laissé à des amateurs. « Un clown professionnel connaît la distance exacte à laquelle il doit se tenir par rapport à son auditoire enfantin. Il sait prendre automatiquement le recul nécessaire quand il voit un enfant manifester de la peur. ..Aussi, malgré toutes ses bonnes intentions, un débutant risque de faire peur à un enfant. J’ai la conviction que les clowns de métier forment pour la médecine un corps d’auxiliaires précieux et quasiment inutilisés ». Le clown représente une bouffée d’air dans ce monde difficile pour les enfants privés de leurs parents.. Le clown à l’hôpital fait preuve d’une grande empathie. Il ne se moque pas. Il n’est jamais méchant, il est tout accueil.

Pascal Broutin